Une première recherche universitaire se penche sur les relations affectives et sexuelles en protection de l'enfance
Simha Bitton, doctorante en sociologie consacre ses travaux de thèse aux relations affectives et sexuelles en protection de l'enfance. Cette recherche - première consacrée à ce sujet - est soutenue par l'Observatoire national pour la protection de l'enfance (ONPE).
Simha Bitton, doctorante en sociologie au laboratoire du GEMASS (Groupe d'étude des méthodes de l'analyse sociologique de la Sorbonne) mène une recherche sur les relations affectives et sexuelles en protection de l'enfance, sous la direction de Pierrine Robin, maîtresse de conférences en sciences de l’éducation et de la formation (et précédemment par Beate Collet, professeure des universités en sociologie et directrice adjointe du GEMASS, décédée en avril dernier).
Soutenue par l'Observatoire national pour la protection de l'enfance (ONPE), cette recherche vise à dresser « un premier état des lieux des personnes qui ont connu une mesure de placement en s’intéressant à leurs relations affectives et sexuelles ». La participation au questionnaire en ligne (durée 15 minutes environ) s’adresse à toutes les personnes majeures qui ont connu une mesure d’accueil au sein des services de l’aide sociale à l'enfance (ASE). Les réponses sont attendues avant le 30 septembre 2023.
Quel est l'état actuel des connaissances sur les relations affectives et sexuelles en protection de l'enfance ?
Simha Bitton : Il n'existe, à ma connaissance, aucune enquête sur les relations affectives et sexuelles des jeunes qui ont connu une mesure de placement au sein des services de l’aide sociale à l’enfance (ASE). Les recherches disponibles soulignent toutefois que les principaux agents de socialisation à la sexualité c’est-à-dire la famille, les pairs et l’école sont bouleversés, redéfinis par cette mesure de placement, supposant une socialisation singulière en la matière. Nous savons par exemple que les jeunes accueillis à l’ASE sont plus souvent dans une situation de déscolarisation. Le point de départ du questionnaire est de se demander si ces jeunes ont un moindre accès à l’information sur les sujets relevant de la sexualité. Moindre accès qui pourrait se traduire par des grossesses précoces, non désirées ou plus généralement une entrée dans la sexualité plus précoce. La situation des enfants placés, pour nombre d’entre eux, victimes de maltraitance, pourrait les conduire à adopter des comportements à risques. Certaines recherches soulignent par exemple que les personnes qui ont été victimes de maltraitances peuvent adopter des comportements à risques. Ce questionnaire permettra donc de dresser un premier état des lieux des relations affectives et sexuelles en protection de l’enfance : l’accès à l’information sur la sexualité, l’âge au premier rapport, les liens affectifs mobilisés à la sortie du placement, etc.
Votre recherche aborde-t-elle la place éventuelle des éducateurs dans cet accompagnement à la vie affective et sexuelle des enfants placés ?
S.B : Oui, c'est un point que j’aborde avec les professionnels sur le terrain. Quel est le rôle des éducateurs, quel est le type d’accompagnement sur ces questions, ont-ils reçu une formation sur le sujet de la sexualité, se sentent-ils légitimes pour aborder les questions relatives à l’affectivité et à la sexualité avec les jeunes ? Dans le cadre du volet qualitatif de ma recherche, je mène des observations dans deux établissements de la protection de l'enfance. Pendant quatre mois, à raison d’un à deux jours par semaine, j'ai réalisé dans une MECS (maison d'enfants à caractère social) des entretiens auprès de mineurs accueillis et de professionnels. En octobre, je débuterai ce travail d’observation dans une autre structure.
Votre travail de thèse est soutenu par l'Observatoire national de la protection de l'enfance (ONPE). Donnera-t-il lieu à des recommandations pour les pouvoirs publics ou les professionnels ?
S.B : Le sujet des relations affectives et sexuelles en protection de l'enfance est peu connu et ma recherche permettra d’alimenter les connaissances sur le sujet. Le rôle de l'ONPE est de produire de la connaissance, de soutenir et de promouvoir la recherche sur la protection de l’enfance. En tant que centre de ressources, l’ONPE a pour mission d’améliorer la connaissance et de diffuser la recherche et c’est dans ce cadre-là que l’Observatoire soutient ma recherche.