Plusieurs collectifs et associations dédiés à la protection de l'enfance demandent des mesures urgentes aux partis politiques, soutenus par 25 000 signataires d'une pétition.
Chaque heure en France, 18 enfants sont violés ou agressés sexuellement [Secrétariat chargé de l’enfance, 2023]. Notre pays est le 4e plus gros hébergeur de contenu pédopornographique au monde. [OFMIN, 2024]. Au vu de ces chiffres réels, il paraît impensable qu’aucun parti politique ne se soit engagé à agir contre les violences faites aux enfants. Pourtant, les droits des enfants sont bel et bien les grands absents de ces législatives anticipées.
Dimanche 9 juin, une petite fille de 4 ans meurt seule dans son lit de l’aide sociale à l’enfance. Une semaine plus tard, c’est une jeune fille de 12 ans qui est victime d’un viol parce qu’elle est de confession juive. De multiples témoignages de racisme envers les enfants remontent au sein des associations. Les enfants sont les premières victimes de cette société adultiste dans laquelle ils évoluent tant bien que mal, et de cette crise politique et sociétale que traverse la France.
Après la dissolution de l’Assemblée nationale, deux commissions extrêmement importantes ont été stoppées ; la commission d’enquête sur l’aide sociale à l’enfance et la commission d’enquête sur les violences sexuelles dans le milieu de la culture ainsi que la délégation aux droits des enfants. Depuis, les enjeux de ces élections ont envahi la scène médiatique et il est regrettable, presque impensable, de constater que le sort des enfants est minimisé voire absent des débats et des programmes, alors que leur protection devrait être considérée comme une priorité nationale.
Nous, collectifs et associations de l’enfance, ne comprenons pas que la problématique des violences faites aux enfants ne soit pas un enjeu politique majeur.
L’aide sociale à l’enfance craque et la santé mentale des jeunes est alarmante : entre 2016 et 2021, le nombre de passages aux urgences pour troubles psychiques chez les moins de 18 ans, notamment des tentatives de suicide, a augmenté de 65 % [Unicef 2022]
Le mouvement #MeTooInceste ainsi que les rapports de la CIASE [Commission indépendante sur les abus sexuels dans l'Eglise] et la CIIVISE [Commission indépendante sur l'inceste et les violences sexuelles faites aux enfants] ont mis en lumière les nombreux dysfonctionnements de prise en charge des enfants victimes de violences sexuelles et l’ampleur du phénomène : 81% des victimes de violences sexuelles sont des mineurs et 94% des agresseurs sont des proches.[rapport mémoire traumatique et victimologie, 2015] C’est 160 000 enfants chaque année, 18 enfants par heure, 1 enfant toutes les 3 minutes.
Aujourd’hui nos enfants meurent et nous regardons ailleurs.
L’insécurité grandissante se trouverait dans nos rues alors que les chiffres nous démontrent le contraire. Le loup est dans la maison. La délinquance est très largement mystifiée et le déni qui entoure les violences faites aux enfants est considérable. Le danger vient toujours d’où on s’y attend le moins. Si les programmes de la droite et de l’extrême-droite se portent sur la protection des français, ils omettent le danger le plus présent pour les enfants : les violences sexuelles, intra-familiales et institutionnelles. Toujours selon leurs programmes, les enfants n’auraient pas les mêmes droits selon d’où ils viennent, c’est la préférence nationale. La Convention internationale des droits des enfants, ratifiée par la France en 1989 nous rappelle que notre pays doit garantir les droits à tout enfant, sans distinction aucune, indépendamment de toute considération de race, de couleur, de sexe, de langue, de religion, d'opinion politique. C’est de notre humanité qu’il s’agit.
Faut-il rappeler que l’ONU a, à plusieurs reprises, critiqué la gestion française de la protection des enfants.
L’enfance est intrinsèquement politique, car les décisions prises aujourd'hui façonnent non seulement le présent des enfants, mais aussi leur avenir. Comment imaginer pouvoir diriger la France, comment penser sérieusement avoir un impact positif sur notre société, sans prendre en compte la situation des enfants dans notre pays, l’étendue des violences qu’ils subissent et les conséquences indélébiles qu’elles ont sur leur enfance et leur vie d’adulte ?
Notre pays ne se construira pas sans les enfants. Pour mettre fin à ce scandale et garantir les droits des enfants, nous proposons quatre mesures essentielles :
- Recentralisation de l’aide sociale à l’enfance : Une réforme en profondeur de l’aide sociale à l’enfance est nécessaire pour assurer une protection efficace et uniforme sur tout le territoire.
- Création d’un ministère de l’Enfance : Un ministère dédié permettrait de centraliser les efforts et les ressources pour répondre spécifiquement aux besoins des enfants.
- Commission indépendante sur le racisme incluant les enfants : Une commission pour enquêter et agir contre le racisme affectant les enfants garantirait une meilleure protection et une égalité de traitement.
- Application des 82 préconisations de la Ciivise : La Commission indépendante sur l’inceste et les violences sexuelles faites aux enfants a formulé des recommandations essentielles qu’il est urgent de mettre en œuvre.
Nous attendons des partis politiques qu’ils se saisissent enfin du sujet et qu’ils intègrent la protection de l’enfance comme une priorité nationale dans leurs programmes respectifs.
Si nous voulons conduire notre société vers un monde plus paisible, prôner la tolérance et le respect de chacun, c'est à nous, électrices et électeurs de France, de nous tourner vers l'avenir et d'affronter le danger là où il se trouve réellement : Les enfants sont massivement victimes de violences, nous devons appeler à leur protection, il y a urgence. Si vous vous demandez ce qui a mal tourné pour que notre société en arrive à la situation actuelle, c'est ici qu'il faut regarder.
Interpellez les partis politiques sur la mise en place de ces 4 mesures en signant la pétition du Collectif Enfantiste qui a déjà récolté plus de 24 000 signatures : https://www.change.org/desmesurespourlenfance
Premiers signataires :
- Collectif Enfantiste
- Collective des mères isolées
- Justice des Familles
- Protéger l’enfant
- Soutien Ciivise
Tribune publiée sur le blog Médiapart du Collectif Enfantiste