Une tribune de 200 signataires (militants, élus et professionnels) publiée dans « Le Monde » alerte sur la situation de la protection de l’enfance.
« Nous avons besoin d’un engagement fort et rapide de la part de l’État en faveur des travailleurs sociaux, afin de garantir la prise en compte des besoins fondamentaux des enfants », réclament les signataires dans la tribune publiée dans le quotidien Le Monde le 19 mars, Journée mondiale du travail social (lire notre article).
La pénurie de professionnels impacte la qualité de l'accompagnement des enfants protégés. « Comment pouvons-nous offrir aux enfants protégés le soutien dont ils ont désespérément besoin ? Pourtant, faut-il rappeler que ces jeunes risquent de perdre vingt ans d’espérance de vie faute de soins précoces ? Qu’ils seront plus d’un quart à quitter l’ASE sans aucun diplôme ? Que 36 % des personnes sans domicile fixe de moins de 25 ans sont passées comme eux par les services de l’ASE ? », interroge la tribune.
Parmi les signataires figurent notamment Didier Tronche, président de la Convention nationale des associations de protection de l’enfance (CNAPE), Michèle Créoff, vice-présidente de l’Union pour l’enfance, ancienne vice-présidente du Conseil national de la protection de l’enfance, Céline Greco, présidente de l’association Im’pactes et cheffe de service à l'hôpital Necker-Enfants malades ou encore Lyes Louffok, militant des droits des enfants. Et également Perrine Goulet,députée MoDem présidente de la délégation aux droits des enfants et Laurence Rossignol, sénatrice PS du Val-de-Marne.
« Comment aujourd’hui pouvons-nous espérer attirer de nouveaux profils avec des salaires qui dépassent d’à peine 100 € le Smic en début de carrière ? »
« Près de 97 % des établissements du secteur de la protection de l’enfance rencontrent des difficultés de recrutement, avec 9 % de postes vacants (contre 5 % en moyenne pour le secteur sanitaire, social et médico-social), un recours à l’intérim de plus en plus important, et de nombreux départs en retraite à prévoir d’ici à 2025 », rappelle la tribune, reprenant les chiffres de l'enquête de l'Uniopss, réalisée auprès de 314 établissements et services et publiée en novembre dernier (lire notre article).
« L'évolution des conditions de travail doit être une priorité, pour soulager les professionnels éprouvés par leur engagement physique et émotionnel. Cela passe par une nécessaire revalorisation des salaires, extrêmement dégradés par l'inflation et que le Ségur – dont n’ont pas pu bénéficier les personnels administratifs et techniques – n’a pas permis de complètement compenser », soulignent les signataires. « Comment aujourd’hui pouvons-nous espérer attirer de nouveaux profils avec des salaires qui dépassent d’à peine 100 € le Smic en début de carrière ? ».
Et d'insister : « Laisser aujourd’hui à l’abandon le métier de travailleur social de la protection de l’enfance est une faute. Une faute à l’égard de la société française et des promesses d’égalité des chances qu’elle promeut. Une désertion de la part de l’État qui doit garantir à chaque enfant un avenir décent, en particulier ceux qui ont été pénalisés dès la ligne de départ. Pour nos enfants, pour l’avenir de notre société, ne laissons plus nos héros dans l’oubli ».
Les signataires estiment que le recrutement de professionnels nécessite « la valorisation des métiers et des offres de formation, la reconnaissance des compétences et la facilitation des passerelles pour encourager les reconversions dans le secteur ». Des recommandations qui figurent dans le Livre blanc du travail social remis par Mathieu Klein, président du Haut conseil du travail social (HCTS) au gouvernement en décembre dernier.