« Délits mineurs » : au cœur des audiences du tribunal pour enfants de Bobigny

Séverine Kakpo, sociologue et juge bénévole au tribunal pour enfants de Bobigny (93), nous offre un témoignage unique sur la justice des mineurs, à travers son podcast « Délits mineurs » diffusé sur ARTE Radio.

« Délits mineurs » raconte la justice des mineurs depuis le point de vue de Séverine Kakpo, sociologue de l'éducation, chercheuse à l'Université Paris 8 et assesseure au tribunal pour enfants de Bobigny, en Seine-Saint-Denis.

Pour rappel, l'assesseur est un citoyen, magistrat non professionnel, , nommés pour quatre ans par le garde des Sceaux, ministre de la Justice, qui siège auprès du juge pour enfants au cours des audiences pénales. Ils sont au nombre de deux pour chaque audience. Le juge et les assesseurs disposent chacun d'une voix, de valeur égale.

Dans le tribunal de Bobigny, un « grand palais de verre, de briques rouges et d'acier bleu », Séverine Kapko constate que « la passerelle est fermée pour cause de corrosion » et que « les toilettes turques sans verrou sont un avant-goût de la prison ».

Ici, « on n’humilie pas les jeunes et leurs parents, où on ne pense pas qu’une difficulté éducative se règle par miracle à coups de suppression des allocations familiales, où on ne s’aligne pas sur les discours populistes », raconte-t-elle. « On filtre l’air du temps, toujours plus nauséabond. On remet en contexte la complexité et la singularité. On prend le temps, on essaie ».

« On est dans le 93, dans l'un des départements les plus pauvres de France. Je ne me fais pas d'illusion, je vais juger beaucoup de jeunes garçons racisés issus de quartiers défavorisés. Des gamins en échec scolaire que l'école n'a pas su repêcher, des ados pris dans des phénomènes de bande des jeunes dont les perspectives d'avenir se résument souvent à être livreur ou guetteur », témoigne Séverine Kakpo. « Je vais les juger au nom du principe de responsabilité individuelle sans jamais parler de la fabrique sociale de la délinquance, sans poser la question des responsabilités collectives. En plus, moi aussi, je suis racisée et moi aussi, j'ai grandi dans un quartier populaire. Intellectuellement, ça ne tient pas la route ; politiquement, ça craint un max », ajoute-t-elle.

Ibrahim, Moussa, Milan… Chaque épisode de ce podcast bi-mensuel est une immersion « dans l’histoire d’un jeune, dans le déroulement d’une audience et dans une expérience subjective, parfois déchirante : celle de juger ».

Un documentaire de Séverine Kakpo
Réalisation : Samuel Hirsch
Illustration : Xavier Lissillour et Iris Lorenzini
À retrouver sur : ARTE Radio