Plus de 5 700 personnes ont renseigné le questionnaire mis en ligne par la Ciivise entre septembre 2021 et janvier 2022. D'après les témoignages recueillis, que sait-on du profil des victimes de violences sexuelles subies durant l'enfance et l'adolescence ?
En un an de travaux, la Commission indépendante sur l'inceste et les violences sexuelles faites aux enfants (Ciivise) a recueilli 11 400 témoignages. Les personnes qui ont complété le questionnaire en ligne sont majoritairement des femmes : 4 680 femmes (88,0 %) et 637 hommes (12,0 %) âgé.e.s de 18 à 65 ans ou plus.
D'après le rapport intermédiaire de la Ciivise publié le 31 mars, 9 victimes sur 10 sont des femmes âgées en moyenne de 44 ans aujourd’hui. Les personnes en situation de handicap représentent 13% des victimes. Autres précisions : 8 victimes de violences sexuelles subies durant l'enfance et l'adolescence sur 10 sont des victimes d'inceste. Et 7 victimes d’inceste sur 10 ont subi ces violences de manière répétée.
L'âge médian pour les premières violences sexuelles incestueuses est de 7 ans pour les filles et de 8 ans pour les garçons.
L'inceste n'est pas « l'apanage d'un groupe social particulier », remarque la Ciivise dans ses conclusions intermédiaires. Lorsque la victime est une fille, l'agresseur est le plus souvent le père, le grand frère, le demi-frère, l'oncle, le grand-père, le cousin ou le beau-père. Lorsque la victime est un garçon, l'agresseur est le plus souvent le grand frère, le demi-frère, le père, le cousin, l'oncle, le grand-père. L'âge médian pour les premières violences sexuelles incestueuses est de 7 ans pour les filles et de 8 ans pour les garçons. Pour commettre les violences, les agresseurs usent de la relation de confiance établie avec l'enfant. Ainsi, 74,4% des personnes (hommes et femmes) ayant subi des violences sexuelles dans l'entourage ont affirmé avoir confiance en l'agresseur.
Parmi les personnes qui ont répondu au questionnaire, plus d'un tiers n'ont pas parlé des violences sexuelles parce qu'elles ont souffert d'amnésie traumatique. Dans les situations d'inceste, pour 60,9% des femmes et 76,2% des hommes, la révélation a été faite plus de dix ans après les faits.
Lorsque les violences sexuelles ont été commises au sein d'une institution, la révélation a été faite plus de dix ans après les faits.
« La mère est la personne à qui les victimes ont le plus fréquemment révélé les violences, lorsque la révélation est immédiate. Plus le délai est grand entre les violences et la révélation, plus les confidents sont diversifiés. Les mères, les professionnel.le.s (enseignant.e.s, psychologues, médecins, animateur.rice.s, entraîneur.rice.s, etc.) et le ou la partenaire sont les trois principaux confidents », explique la Ciivise. Toutefois, la parole des victimes ne suscite parfois aucune réaction de la part du confident. Dans les cas d’inceste, lorsque l’enfant a confié les violences à un tiers, ce confident n’a rien fait dans 4 cas sur 10.
Lorsque les violences sexuelles ont été commises au sein d'une institution, pour 53,3% des femmes et 67,4 % des hommes, la révélation a été faite plus de dix ans après les faits. Dans les situations d'inceste, c'est le cas pour 60,9 % des femmes et 76,2 % des hommes.
Près de 100 % des enfants victimes présentent des troubles psycho-traumatiques, quels que soient l’âge, le sexe, la personnalité ou les antécédents de la jeune victime. « Selon les enquêtes récentes, 70 à 96% des enfants victimes de violences sexuelles déclarent à l’âge adulte un impact important sur leur santé mentale, et 50 à 70 % sur leur santé physique, 50 % font des tentatives de suicide, 50 % des dépressions à répétition, 30 à 50 % présentent des conduites addictives », ajoute le rapport.
Selon la Ciivise, 160 000 enfants sont victimes de violences sexuelles chaque année en France.